13/04/2022
Quatrième extrait du livre "Les Enfants du Ça"
Les Enfants du Ça
Extrait: la Vision
contexte: Toute la bande de jeunes, en proie à des substances diverses, est happée par des tourments individuels et violents. Mais Hanya monte sur la table et les reprends dans leur naufrage...
"(...)"Hanya recule un peu et me lance un regard virulent :
— Ils préféraient quand tu leur expliquais comment faire.
— De quoi tu parles ? le ton monte radicalement.
Il se met à tournoyer,
— Ils voulaient que tu leur dises encore ! et encore !
Les autres restent muets tandis qu’Hanya rentre dans une sorte de colère perturbante.
— Que moi je leur dise ?
— Oui que tu leur dises ! Que nous puissions tous jouir en paix ! C’est ça le fantasme ! C’est ça qui les ferait jouir.
Cali rit de son côté en voyant le feu monter. Hanya bondit sur la table basse avec une voix de plus en plus belliqueuse.
— C’est ça la jouissance, hein ! C’est comme ça seulement que vous pouvez bander ! Avec un esprit bien fixe ! Vous voulez l’esprit confort ! La ligne bien tracée ! Le bœuf prémâché ! Bien ! Je vais vous le donner ! Pour que vous n’ayez plus aucune raison de ne pas mouiller votre pantalon !
Il tape deux gros coups de talons sur la table manquant de faire sauter les verres posés dessus.
— Vous êtes des êtres libres qui cherchez sans arrêt une solution qui n’existe nulle part ! Mais vous voulez la solution ?! VOUS SAVEZ DÉJÀ TOUT ! Dieu n’existe pas !
Il envoie valser un verre avec son pied.
— La Science ne sait rien ! -envoyant valser un second verre- et personne d’autre que vous ne peut mieux connaitre votre foutu monde ! Et vous savez pourquoi ?
Il se met à quatre pattes comme un lion, se hissant sur Tio. En relevant le visage sauvagement face au sien, il darde ses yeux et de ses griffes semble écarter ses paupières. —
— Car depuis le début, vous Voyez. Et rien ne pourra jamais mieux voir le monde que vos yeux. Car bien que l’aigle aurait l’œil propre et serait roi, son Soleil ne serait jamais le même que celui du lézard. Seul l’instinct de l’être libre est monde et connait l’infini.
Et maintenant, il se hisse d’un jet à nouveau sur la table, les deux pieds claquants :
— vous avez peur ! Car vous êtes nus et seul maître dans des terres vastes et sans frontières ! Mais vous réaliserez très vite si vous vous y tenez sans vous trahir, que c’est par là que vos puissances viendront les plus vives, que votre corps sera le plus preste, et que le mouvement entier de votre vie sera le plus intense.
C’est la liberté qui vous rend possible par-delà toutes choses.
Tio se lève d’un coup, tout le poids qui le harassait se déleste en un geste juvénile.
— Moi je dis vive ! Plus jamais de mensonges ! Plus jamais d’illusions et de belles pommettes bien trop vagues ! Et même si sur ce chemin il y aura du malheur, ce sera mon malheur !
Cali se met à côté de moi, fière de Tio et, en le regardant les yeux larmoyants, elle finit par me mordre le cou de joie. (...) "
Orell Kingzy